Rapports entre mémoire et cerveau
Mémoire à court terme :
La mémoire à court terme intervient après la mémoire sensorielle et avant la mémoire à long terme. Elle nous permet de retenir temporairement une information. Ainsi c'est une mémoire qu'on utilise en permanence durant notre vie.
Mais quelle région de notre cerveau utilise-t-elle ?
Le meilleur moyen de répondre à cette question est de considérer les travaux de Baddeley. Ce psychologue a inventé le meilleur modèle de la mémoire à court terme pour étudier les régions impliquées.
Ce modèle suppose que la mémoire de travail repose sur un système à trois acteurs. Le premier est l'administrateur centre, puis on retrouve deux sous système de stockage différenciés : la « boucle Phonologique » et le « Calepin Visuo-spatial » :
- La boucle phonologique va retenir les informations verbales entendues ou lues pendant environ deux secondes.
- Le calepin visuo-spatial maintient les informations visuo-spatiales et les images mentales.
- L'administrateur central joue le rôle de gestionnaire. Ainsi il va coordonner les activités et permettre de réaliser deux tâches simultanément lorsque une nécessite un stockage et l'autre un traitement (exemple : l'élève écoute une phrase dans une langue étrangère (stockage) et doit la traduire dans sa langue natale (traitement))
Si on analyse à grande échelle d'abord, la mémoire à court terme est principalement dû au lobe préfrontal. Comme le prouve l'image dessous obtenu grâce à la technique de résonance magnétique fonctionnelle (une technique basée sur l'augmentation du débit sanguin cérébral associée à ses aires les plus actives) lorsque le sujet garde en mémoire l'image d'un visage, soit qu'il utilise sa mémoire à court terme.
Le lobe frontal est une région située à l'avant du cerveau, elle est très développée chez l'humain. Cela explique pourquoi l'homme à un grand front droit et non pas un front fuyant comme des primates.
Image obtenue par résonance magnétique montrant
l'activité du lobe préfrontal lors de la mémoire à court terme
Mais ce serait bien indigne de la complexité de notre cerveau, de résumer la mémoire à court terme uniquement à cette région. Ainsi les deux sous systèmes de stockage en utilisent d'autres. Par exemple la boucle phonologique active l'hémisphère gauche que l'on associe à la production du langage comme l'aire de Wernicke et l'aire de Broca. Et le calepin visuo-spatial nécessite l'usage du cortex occipital généralement associé au traitement visuel.
Des interrogations restent également sur le rôle du cortex prefrontal dorso-lateral. En effet cette région est activée lorsque la tâche est difficile pour le patient comme lorsqu'il doit alterner entre deux tâches mnésiques ou lorsqu'il doit explorer différentes possibilités avant de faire un choix. Les scientifiques ne savent pas si c'est une zone de stockage temporaire, si son niveau d'implication dépend de la difficulté ou tout autre chose. Donc le support anatomique de la mémoire de travail reste encore bien mystérieuse en raison de sa complexité.
Mais celle-ci s'accroît encore davantage si on prend en considération le fait que la mémoire se déroule dans le temps. Par exemple, les résultats de l'expérience illustrée en-dessous montrent que les différentes régions du cerveau changent successivement leur niveau d'activité durant une tâche qui consiste à retenir l'image d'un visage. Quand des images brouillées sont présentées au sujet (les barres bleues), ce sont surtout les régions visuelles de son cerveau qui s'activent (1). Quand les visages sont présentés (barres noires), ce sont les régions associatives et les régions frontales qui deviennent plus actives (4,5,6). Et finalement, quand le sujet retient un visage dans sa mémoire de travail, (barres rouges), les régions frontales sont les plus actives alors que les régions visuelles sont à peines stimulées.
Image de résultats de l'expérience
Mémoire à long terme :
Nous avons vu que lorsqu'une information est maintenue suffisamment longtemps dans la mémoire à court terme, elle est transférée dans la mémoire à long terme. Mais nous avons également vu que cette mémoire est divisée en d'autres parties. Donc nous allons voir comment se produit le transfert d'information d'une mémoire à l'autre et les régions activées par les différentes sous parties de la mémoire à long terme.
Le passage de la mémoire à court terme à celle à long terme se fait grâce à l'hippocampe.
L'hippocampe est une structure de notre cerveau, plus précisément du lobe temporal médian, il est de petite taille et courbée. On en retrouve un dans chaque hémisphère (gauche et droite).
Le rôle de l'hippocampe :
L'hippocampe reçoit et décode toutes les informations des différentes aires sensorielles, puis il les renvoies à leur origine. Son rôle est comparable a un centre de tri qui compare les nouvelles sensations et celle déjà enregistrées. Mais c'est aussi lui qui créé les liens entre ces différentes informations provenant de sens différents.
Ainsi la répétition ou les procédés permettant de retenir des faits nouveaux, correspondent donc à de multiples passages dans l'hippocampe. Il va renforcer les liens (grâce à un remodelage physique) entre ces nouveaux éléments, et au bout d'un certain stade nous n'avons plus besoin de lui. C'est-à-dire qu'il n'est plus nécessaire que les informations continuent à passer dans l'hippocampe. Elles sont encodés dans les régions où les informations sensorielles qui sont à l'origine des souvenirs ont été reçues (le cortex occipital pour les souvenirs visuels, temporale pour les souvenirs auditifs, etc.).
Ainsi ces informations pour lesquelles le cortex parvient à lier de lui même les caractéristiques peuvent durer des décennies, voire toute la vie. Ce qui n'est pas le cas si elles restaient dépendante à l'hippocampe.
Tout cela explique que l'hippocampe joue un rôle dans la mémoire déclarative, celle des faits et des évènements, mais aussi dans la mémoire épisodique, qui est la mémoire nous permettant de nous rappeler des années plus tard de cette soirée.
Vous avez l'impression d'être perdu? ce n'est pas grave ! nous allons illustrer ce processus pour que ce soit plus clair.
Prenons le cas d'un repas arrosé avec des amis. Durant cette soirée, différentes informations vont être relevées par nos sens : avec la vue on va retenir le visage des personnes, avec l'ouie la musique et avec le goût les arômes de la nourriture. L'hippocampe va alors recevoir toutes ces informations venants de ces différentes aires sensorielles et va les lier entre elles. Ainsi ces informations vont être liées pour former un souvenir « global » et non plusieurs séparés.
Mais au bout d'un certain moment, ces différentes régions activées sont suffisamment liées entre elles et peuvent se passer de l'hippocampe. Ainsi, le seul souvenir par exemple de la musique permet de nous rappeler de toute la scène du souper. Chaque élément individuel sert d'amorce au souvenir global.
Donc pour un ancien souvenir de notre mémoire à long terme, l'hippocampe n'est plus nécessaire.*
Pour les personnes voulant en savoir un peu plus :
Au-dessus nous évoquions « de multiples passages dans l'hippocampe ». Cela correspond en réalité au célèbre circuit de Papez. C'est un ensemble de connections qui relient les structures limbiques entre elles.
Le schéma ci-dessous montre comment l'information y transite successivement de l'hippocampe aux corps mamillaires de l'hypothalamus, au noyau antérieur du thalamus, au cortex cingulaire, jusqu’au cortex entorhinal pour revenir finalement à l'hippocampe
Illustration du "circuit de Papez"
Maintenant que nous avons vu les acteurs du passage de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme. Nous pouvons étudier les régions actives lors de l'utilisation de cette dernière.
Des acteurs différents pour chaque type d'information (liste non exhaustive) :
- Les connaissances générales de la mémoire sémantique, n'utilise que le cortex frontal et le cortex temporal et non pas l'hippocampe (car nous faisons l'hypothèse que ces connaissances sont anciennes et que le processus expliqué au-dessus est intervenu).
- Notre mémoire procédurale, celle du " savoir faire " comme aller à bicyclette par exemple, ne solliciterai pas du tout l'hippocampe. Elle serait plutôt associée à des modifications dans le cervelet, les ganglions de la base et le cortex moteur, des régions justement impliquées dans le contrôle de la motricité. Cela explique que la mémoire procédurale ne soit pas touchée par l'amnésie liée aux lésions de l'hippocampe
- Notre mémoire spatiale demeure dépendante intégralement de l'hippocampe car celui-ci aurait la capacité de recréer une carte mentale de l'espace, grâce à certaines cellules dites ''cellules de lieu''
- Notre mémoire émotive, qui est utilisée pour les souvenirs personnels très intenses utilise l'hippocampe et une autre structure du système limbique : l'amygdale. C'est une région déjà connue pour gérer nos réactions de peur.
Partie frontale